Au moment où la précampagne
électorale bat son plein en Angola, toute notre attention est tournée vers
les « têtes de liste » de chaque parti en compétition. J’ai la
certitude que durant ces cinq dernières semaines, beaucoup d’entre nous
accompagnent, même de loin, le déroulement de la campagne en essayant d’avoir
le plus d’informations pour se forger une opinion. Il n’est un secret pour
personne que le Mpla qui dispose des moyens financiers importants met les
bouchées doubles pour promouvoir son nouveau candidat. Dans les réunions et
meetings, la lutte contre la corruption et l’impunité figure en tête de liste
des engagements électoraux. Sachant que l’épicentre de la corruption se trouve
à la présidence de la République, je m’interroge sur la capacité du candidat du
Mpla à renverser la tendance. Tout bien considéré, je crois que mon oncle,
celui qui vit à Bangoula-city, a raison lorsqu’il affirme que les promesses du
Mpla sont des balivernes. Ce ne sont que des promesses électorales. Car,
logiquement, comment peut-on s’attaquer à un clan auquel on appartient ?
Un clan auquel on est redevable de tout : ascension politique, stabilité
financière, haut standing de vie. Quels que soient les petits frottements qui
sont apparus au cours de l’existence du Mpla dans les relations à l’intérieur
du clan, les loups ne se mangent jamais entre eux. D’ailleurs, dans un article de Silvia Caneco publié sur le site
de Visâo.pt, une analyse consacrée à la
Banque Espirito Santo Angola (BESA), beaucoup de membres de ce clan sont mis en
cause. Vous avez surement déjà entendu parler de cette banque qui a fait
faillite à cause de la mauvaise gestion de ses dirigeants. Énormément de
rumeurs, fondées ou non, ont circulé au sujet du dépôt de bilan de BESA. Mais
pour ne pas écorner l’image du régime angolais, tout a été fait pour étouffer
l’affaire. Malgré le temps qui s’est écoulé entre la faillite de cette
institution bancaire et sa restructuration en « Banco Económico »,
mon oncle, ce fouineur, a tenu à m’en parler pour qu’à mon tour je vous en
parle. Selon la journaliste de Visâo.pt, la liste officielle des clients qui
auraient bénéficié des crédits de la BESA (capital de la banque 5.700 millions de dollars), quand
l’institution était dirigée par Alvaro Sobrinho, n’a jamais été publiée. Seulement,
en Angola les noms de ces supposés clients ont circulé, et il faut le
reconnaitre, la publication de ces noms a mis certains dignitaires importants du
régime dans une situation très inconfortable.
Joâo Manuel Gonçalves Lourenço,
actuel ministre de la Défense et tête liste de liste du Mpla aux prochaines
élections, vice-président du parti au pouvoir, probable futur président de la
République, est sur la liste. Il aurait bénéficié de 30 millions de dollars de
crédit auprès de BESA. Manuel Nunes Junior, secrétaire du Mpla pour la
politique économique et sociale apparait aussi sur la liste pour avoir obtenu
un crédit de 20 millions de dollars. Robert de Almeida, l’ancien vice-président
du Mpla, connu pour sa droiture et sa rigueur, est également sur la liste avec
un crédit de 30 millions de dollars. Il aurait investi 10 millions dans la
construction d’un immeuble. Et lorsque les services de recouvrement de BESA l’ont contacté pour
récupérer leur dû, Roberto de Almeida les a poliment éconduits en disant que,
pour lui, les 30 millions de dollars étaient un « cadeau ». Un
don de la banque au vice-président du
Mpla. C’est incroyable. Mais ça, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg.
Il y a aussi des Portugais sur la
liste. Ils ne sont jamais loin dans tous les maquignonnages qui ont lieu en
Angola. Dans celui de BESA, en partenariat avec Marta dos Santos, sœur du
président Dos Santos, José Guilherme, un sujet portugais qui évolue dans les hautes
sphères de la politique angolaise, aurait bénéficié de près de 800 millions de
dollars qui ont été investis (?) dans la construction des édifices à Talatona à
Luanda. Au moment de mettre la clé sous la porte (pourrait-il en être
autrement ?), José Guilherme n’aurait reconnu que 121 millions de dollars
des 800 millions sortis de la banque. Dans aucun pays du monde, vous ne
connaitrez des situations identiques. Aucun.
Et le président de cette banque
ai-je demandé à mon oncle ? Étant donné que la charité bien ordonnée
commence par soi-même, m’a-t-il dit,
Alvaro Sobrinho, puisque c’est de lui qu’il s’agit, se serait attribué
745 millions de dollars.
Lorsque cette information fut
divulguée à Luanda, un certain Ricardo Salgado, ami de José Guilherme et de
Marta dos Santos, prit contact avec le président Dos Santos pour l’informer de
la situation de BESA. Vu l’énormité du scandale, Dos Santos, pour éviter
d’éclabousser le Mpla, un parti dont les messages sont de moins en moins convaincants,
décide de concéder une garantie souveraine de plus de 5.000 millions de dollars
à BESA pour couvrir les crédits de ses amis et proches. C’est cet argent qui a
permis de restructurer BESA en faillite et créer à sa place le « Banco
económico ». Pendant combien de temps va-t-on encore avoir à la tête de
l’Angola des dirigeants mouillés dans des magouilles de cette nature ? Si
BESA a fait faillite, c’est parce que l’argent prêté n’est jamais rentré dans
ses caisses. C’est affligeant.
Eduardo Scotty M.