Dans mon blog intitulé
« Procès des 15+2 : partie pénale » du mois de décembre 2015, je
vous avais invité à débattre sur l’arrestation des jeunes « revus »
qui avaient osé contester le pouvoir du président Dos Santos. Ils étaient
accusés de préparation d’actes de rébellion et de tentative de coup d’État.
Arrêtés, emprisonnés, ils ont fini par être jugés et condamnés exactement comme
l’opinion publique s’attendait depuis des mois. Aucune surprise. Le régime, dont
la popularité est en chute libre depuis que le prix du baril de pétrole a
baissé, ne pouvait pas laisser passer une telle occasion. L’arrestation des
jeunes contestataires était une aubaine pour le pouvoir. Depuis l’affaire
Miala, cela fait un bout de temps que les services secrets n'avaient plus rien à se mettre sous la dent. Ils cherchaient une
raison pour faire taire tous ceux qui avaient des idées contraires à celles du
parti au pouvoir. L’arrestation d’un groupe de « comploteurs » était
une planche de salut pour un régime dont le caractère dictatorial devenait
chaque jour plus évident. À cet effet, suivant un scénario bien monté, un
tribunal dont le but est de faire trainer le procès en longueur, est constitué
rapidement. Il a fallu près de neuf mois pour prononcer le jugement. L’objectif
était de briser psychologiquement les accusés et préparer l’opinion publique
nationale à accepter le verdict final. Jamais un procès n’a été aussi critiqué,
dans les médias étrangers, comme celui de Luanda. Arrêtés, pour préparation
d’actes de rébellion et tentative de coup de force contre la personne du Chef
de l’État, ils furent à la fin de la procédure accusés d'association des
malfaiteurs par le Ministère public dans son réquisitoire. C'est la seule accusation trouvée qui correspond avec une disposition du code pénal. Incroyable. Ce subterfuge est employé parce que le tribunal était
devant un dilemme. Les dégâts causés par l’incompétence des juges à la justice
de notre pays, et au titulaire du pouvoir exécutif devaient nécessairement
conduire à un verdict, quel qu’il soit. La cour était au pied du mur. Si elle
ne condamnait pas les accusés, elle serait mal vue, alors les juges ont opté
pour la condamnation. C’est simple. Or, pour condamner, il faut avoir dans le
dossier des éléments qui incriminent et non des preuves fabriquées à la
sauvette. Si nous faisons la lecture de tout ce qui s'est passé depuis leur arrestation jusqu'à ce jour, nous pouvons
affirmer sans peur d’être contredit que c’est le courage des jeunes
« revus » et la justesse de leur cause qui ont été condamnés. Ils ont
osé là où beaucoup d’entre nous n’osent pas. Corrigez-moi si je me trompe, mais
le courage et l’intention n’ont jamais constitué un crime. Je dis cela pour les
pays démocratiques. Je me demande si l’Angola peut être considéré comme un pays...démocratique.
Pourquoi cet acharnement sur ces jeunes
« revus » ? Pourquoi ? Cette question m’emmène à vous
inviter, aujourd’hui encore une fois, à cet exercice que vous détestez
tellement, celui de réfléchir ensemble au pourquoi de la situation qui nous
intéresse.
D’abord, sachez qu’à l’origine de l’arrestation, de l'emprisonnement
et du procès de nos jeunes frères, il y a un Général des Forces armées
angolaises. Un grand défenseur du régime du président Dos Santos. Il est prêt à
donner sa vie pour sauver le pouvoir qui lui garantit la vie de luxe qu’il mène
à Luanda. Pour preuve, il a même refusé de prendre sa retraite, il a 72 ans,
pour continuer à assurer la pérennité du régime. Il est très fort dans les
intrigues et la fabrication des preuves. Les officiers supérieurs issus de
l’Unita et versés dans l’armée nationale en savent quelque chose. J’allais
oublier de vous dire qu’il est aussi membre du comité central du parti au
pouvoir. Depuis que Dos Santos a annoncé son intention de quitter la
politique…active en 2018, notre général a des insomnies. Le fait qu’il ne soit
pas informé de cette décision par son protecteur, l’a rendu très nerveux. De retour dans son service, il a réuni tout
son personnel pour leur exprimer sa désapprobation. Il s’est montré visiblement
très irrité par l’attitude de Dos Santos qui l’a vraisemblablement surpris. Selon
lui, l’idée du président de se retirer de la scène politique est précipitée
compte tenu de la situation économique du pays. Cette intention vient, toujours
selon lui, semer la confusion (sic) dans les esprits des militants du parti. Ce
qui, à son avis, peut perturber le climat politique et donner lieu à des
conséquences pires. Lesquelles ? Seul notre général les connait.
À quoi sert-il de s’insurger contre une décision, que tout le
monde estime raisonnable, si à la place on ne présente aucune proposition
alternative. Le général insiste sur le
maintien de son patron au pouvoir, mais il ne dit pas pourquoi . Moi je vous dis qu'il a peur du lendemain. Si Dos
Santos s’en va, il faudra qu’il s’en aille avec lui, car celui qui viendra ne
sera peut-être pas aussi tolérant et protecteur que Jes l’ait été envers lui.
Mais, ne dit-on pas que : mieux vaut une fin qui fait peur, qu’une
peur sans fin ?
Durant les 37 ans de son long mandat, le président a toujours
écouté ce général. Beaucoup d’erreurs et fautes commises sur le plan de la
sécurité intérieure, au cours de ce mandat, l’ont été à cause de ce même
général. La dernière en date, je vous le rappelle, est l’interpellation des 15+2
« revus ». Le pays n’avait vraiment pas besoin de ça. Mais le général
en a décidé autrement. Ses services, sur ses ordres, ont mis le président et
son procureur général devant un fait accompli. Pris au piège, le pouvoir a été
obligé de jouer le jeu. Prétextant la séparation des pouvoirs, Dos Santos, le
chef suprême de l’exécutif angolais, s’est alors muré dans un silence complice
et effrayant en laissant condamner de jeunes gens qui sont nés et grandis sous
son régime alors qu’un seul ordre de lui aurait clôturé ce dossier gênant. Mais
comme disent les sages : quand le vin est tiré, il faut le boire. Pour
sauver les apparences, un tribunal est désigné pour prendre la suite de la pièce
théâtrale. Seulement, les juges choisis pour conduire le procès ont été d’une
incompétence incroyable. Ils ont eu beaucoup de peine à appliquer correctement
la loi. À chaque étape du procès,
ils attendaient les « ordres
supérieurs » avant de statuer. C’est ainsi que le « volet
politique » de cette affaire n’a pas lieu. Les personnes convoquées pour témoigner
au cours de ce simulacre ont presque toutes refusé de se présenter à ce
tribunal qu’ils considèrent comme une mascarade. Quelle image pour la Justice
angolaise. Après Marcos Mavungu, les 15+2, à qui le tour ?
Voila où un excès de zèle, un dévouement aveugle, une loyauté
sans mesure peuvent conduire un homme dans la recherche d’une reconnaissance,
parfois qu’il ne mérite pas. Ils sont condamnés, mais leur action a fait bouger
les lignes. Croyez-moi. Après le 28 mars
2016 ne sera pas pareil à avant 28 mars 2016 dans notre pays.
Vous avez trouvé
le nom du général dont je parle ?
Mieux vaut une fin qui fait peur
qu’une peur sans fin.
Dany.
RépondreSupprimerDe plus en plus intéressant. Je ne connais pas le nom de ce général mais je sais qu'il doit être un de ces individus qui sont nés en Angola mais d'origine inconnue. Parce qu'il était vraiment un fils du pays, il saurait que les agissements de ces jeunes sont légitimes et méritent l'appui de tous les vrais angolais.