dimanche 6 août 2017

Après Dos Santos, le MPLA resistera-t-il à l'implosion?


Dans moins d’un mois, les Angolais seront appelés à élire leurs dirigeants pour les cinq prochaines années. Dans la capitale comme à l’intérieur du pays, apparemment, la campagne électorale se déroule sans incident majeur. Un fait presque rare dans une démocratie africaine naissante. Toutefois, parler de perfection dans l’organisation d’un scrutin dans nos pays, c’est se faire des illusions. Tout ce que nous souhaitons, c’est au minimum des élections apaisées et justes. Quant à la transparence, nous sommes encore très éloignés de cet objectif. Je suis presque certain que l’installation de la démocratie dans le temps donnera satisfaction à ce désir des peuples. Celui de l’Angola espère connaitre pour la première en 42 ans une alternance politique. Quel que soit celui qui sera élu à la tête du pays, l’Angola entrera dans une ère post-dos Santos. Alors, posons-nous la question de savoir : quelles sont les chances du Mpla de rester uni après la sortie de Jes ?  Le parti va-t-il imploser ? Je rappelle ici qu’il existe depuis plusieurs années à l’intérieur de ce parti un fort courant politique, dirigé par le Général Silva (Mpla- Tendências), qui réclame des réformes que Dos Santos a toujours refusé d’engager.  Si nous ajoutons à ce courant la fronde menée par Irène Neto et Ambrosio Lukoki, la contestation prend la forme d’une véritable sédition à l’intérieur de ce parti. L’apparente unité que nous offre le Mpla n’est qu’un leurre. Il suffit de regarder de quelle manière le président angolais, malgré sa maladie, se démène pour essayer de replacer ses pions avant son départ définitif du pouvoir pour s’en rendre compte. Carlos Feijó, un fidèle parmi les fidèles, revient en force à la présidence de la République où il retrouve son ami Kopelipa. Grâce à un décret présidentiel, confectionné à la mesure de ses compères, les chefs militaires en fonction dans l’armée et dans la police sont assurés de rester à leurs postes jusqu’en 2025. À la tête de la Sonangol et du Fonds souverain, Isabel et Filomeno dos Santos sont maintenus pour plusieurs années. Interdiction au prochain président d’y toucher ! Ce verrouillage, comme vous l’aurez remarqué, est l’œuvre d’un dirigeant désespéré qui a peur que son passé le rattrape. Seulement, tout cela n’a de sens que si le président Dos Santos ne meurt pas avant. Un scénario que je ne souhaite pas, mais qui est envisageable. Avec sa disparition physique, des ambitions cachées vont se libérer et donner certainement lieu à un désordre au sein du Mpla. L’insoumission à peine voilée d’Irène Neto est la pointe visible de l’iceberg. Sommes-nous au début d’une révolution de palais dans les rangs du Mpla ? Je n’anticipe rien. Je me pose simplement la question et croyez-moi, je ne suis pas le seul.

Le deuxième scénario est celui de l’élection d’un membre du Mpla qui serait appelé à obéir au doigt et à l’œil au leader du parti. Là, nous serons dans une configuration de bicéphalisme. Le président élu étant appelé à appliquer la politique du parti, le chef de ce parti ne se privera pas d’intervenir dans la conduite de la chose publique. Une situation que Lopo do Nascimento, ancien premier ministre et membre influent du Mpla, considère comme une ineptie que sa raison désapprouve et que son cœur désavoue. Pour lui, le président sortant doit prendre ses distances avec la politique active sous toutes ses formes. Le pays a besoin de vivre pleinement ce premier passage du témoin.  Beaucoup de militants du Mpla désirent qu’après le départ de Dos Santos, le parti et le pays se libèrent du système qu’incarne le président sortant et qui a engendré la corruption, le népotisme et l’impunité. D’ailleurs, son dauphin, Joâo Lourenço, ne cache pas sa volonté (!) de s’attaquer à ces maux. Le pourra-t-il ?

 Cette volonté de Dos Santos d’avoir un regard sur la gestion de la chose publique crée un malaise au sein de la classe politique. N’eût été sa maladie, le président Dos Santos aurait-il manifesté son intention au peuple angolais de quitter le pouvoir ? Tous ceux qui s’intéressent à la politique angolaise n’hésitent plus à parler de machiavélisme au sujet de cet homme qui, à travers les décrets présidentiels taillés sur mesure qu’il publie, tente de garder le contrôle sur les affaires de l’État.  « La maladie  l’a pris au dépourvu » affirment les observateurs. À dire vrai, c’est depuis quelques années qu’il planifie sa sortie. Très méthodiquement, il procède par étape. D’abord, c’est à son cousin, Manuel Vicente, grand argentier à la Sonangol, qu’il confie, malgré la désapprobation des caciques du Mpla, la vice-présidence de la République. Ce sont les médiocres résultats de ce dernier à ce poste qui le conduisent à revoir ses plans. C’est alors qu’il se retourne vers Joâo Lourenço, un militaire tombé en disgrâce et ramolli par une exclusion temporaire, pour lui servir de dauphin. Psychologiquement diminué à cause de son passage à vide pendant les années qu’il est resté sans fonction, Joâo Lourenço est prêt à tout pour retrouver les faveurs du chef. Dans l’entre-temps, Dos Santos, en fin politicien, confie les cordes de la bourse à ses enfants. La succession et les finances étant assurées, il pousse ses députés à voter une loi organique le mettant à l’abri de toute poursuite judiciaire. Et la boucle est bouclée. Qui peut faire mieux. Si ce n’est pas du machiavélisme, en tout ça y ressemble beaucoup.

 

Sobamasoba, l’analyse politique qui informe.

Eduardo Scotty M.

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