dimanche 29 mai 2016

Insécurité à Luanda: la population civile traumatisée.



Séquestrations, rapts, assassinats, cambriolages des résidences, falsifications des documents, sont les termes qu’on retrouve depuis quelque temps dans la presse angolaise et dans les conversations à Luanda. À en croire les sites d’informations angolais, la sécurité à Luanda et ses environs continue à poser de sérieux problèmes. Il ne se passe pas un seul jour sans qu’on ne parle d’assassinats, de séquestrations ou de cambriolages. Le nombre des personnes tuées dans des circonstances souvent inexplicables a tellement augmenté que la capacité de  la police nationale à apporter des réponses pertinentes au problème a atteint ses limites. Le nouveau « modus operandi » adopté par les délinquants, les rapts assortis d’une rançon, a pris de court les éminences grises de la police angolaise au point où rouler sur les voies express ou sur les autoroutes de Luanda est devenu très périlleux. C’est sur ces voies que les enlèvements ont le plus souvent lieu. C’est lucratif et sans risque pour les délinquants qui voient dans l’impuissance de la police un interstice pour leur job. La nuit, dans les rues obscures de la cité, la présence de ces mêmes délinquants  provoque une peur panique dans la population civile. Ceux qui ont des objets de luxe à la maison ne dorment plus que d’un seul œil. Et vous savez pourquoi? La réponse se trouve dans un récent passé de notre histoire .

Je vous avais dit dans mon dernier blog qu’il est parfois nécessaire de remonter le temps pour trouver des réponses à nos interrogations d’aujourd’hui.   

Pour les observateurs avertis de la vie en Angola et particulièrement à Luanda, il y a longtemps que le ver est dans le fruit. Personne n’ignore que dans notre pays, il n’y a aucun magasin qui vend des armes à feu. Et pourtant, à la périphérie de la ville, loin des regards de la police, les cambrioleurs se pavanent armés jusqu'aux dents. D’où viennent leurs armes ?

Pour ceux qui ne connaissent pas Luanda, à l’époque coloniale, et ça n’a pas beaucoup changé, à la périphérie de la ville les autochtones vivent dans des quartiers appelés « musseques ». À l’accession du pays à l’indépendance, les populations de ces quartiers (Zambizanga, Cazenga, Rangel, Precol, Cassenda, Cassequel, Prenda),  pour des raisons que vous connaissez surement, ont tous soutenu le Mpla. Ce qui fait que pendant le conflit armé qui a précédé l’acte de la proclamation de l’indépendance, conflit généré par le non-respect des accords d’Alvor, ces populations ont servi de bouclier contre les incursions des troupes du Fnla et de l’Unita. Le Mpla, dont la qualité combative des guérilleros laissait beaucoup à désirer, avait choisi de distribuer d’une manière incontrôlée des armes aux habitants de ces quartiers. Je crois qu’il est inutile de rappeler ici que ce n’est pas par voie démocratique que le Mpla est arrivé au pouvoir. Sur le moment, les dirigeants du Mpla de l'époque n’avaient pas mesuré les conséquences de leur acte. Ils voulaient à tout prix garder le pouvoir qu’ils venaient d’usurper sans trop réfléchir aux conséquences. Donner une arme à feu à un civil, c’est lui octroyer un pouvoir dont il ignore les limites. Par cet acte que je qualifie de déraisonnable, le Mpla avait semé les premières graines de l’insécurité que nous connaissons aujourd’hui. Je vous rassure, la germination ne s’est pas faite tout de suite. La pauvreté ambiante et collective de l’époque n’incitait pas encore aux cambriolages.  

C’est le retour des Angolais réfugiés dans les pays voisins qui a été le déclic. Ce retour a donné lieu à la naissance de nouveaux quartiers. Des quartiers (Petrangol, Mabor, Palanca, Kikolo) construits par les « regressados » à l’image de ceux où ils avaient vécu durant leur exil. Des zones entières avec des maisons en dur, des sanitaires et des voies droites bordées d’habitations. Des quartiers qui ont suscité de l’envie dans le regard des Luandais habitués à vivre dans les « musseques » insalubres et non urbanisés. Les plus envieux parmi eux, dans un sauvage élan de jalousie, insinuèrent que c'est l’État qui finançait la construction de ces nouveaux quartiers. C’est à partir de là que Luanda connait ses premiers cambriolages, et ses premiers assassinats. Si  psychologiquement, les Luandais n’étaient pas préparés à accueillir des « gens » venus d’ailleurs, il leur était aussi difficile de vivre avec des gens dont ils étaient culturellement différents. Et le discours politique de l’époque ne favorisait vraiment pas la coexistence pacifique. C’est comme cela que sont apparus les premiers germes de la criminalité. Vous conviendrez avec moi qu’il est inutile de se demander d’où venaient les armes. Puisqu’après leur distribution en 1975, personne ne s’était préoccupé de leur récupération. Des milliers d’armes à feu sont restées dans la nature. Quiconque en possédait une pouvait s’en servir comme il voulait, en toute impunité. Ce sont ces mêmes armes qui ont tué Chitunda, Mango, Salupeta Pena et autres dirigeants de l’Unita à Sambizanga. Vous vous rappelez l’épisode de la Commission conjointe militaire ?

 Le pouvoir, qui n’avait pas encore trouvé ses marques, avait peur de contrarier ces hommes à qui il avait confié sa défense. Les méfaits dont ils avaient pourtant connaissance étaient considérés à leurs yeux comme des dégâts collatéraux. Et comme ces forfaits n’avaient lieu que dans les quartiers habités par des «zaïrenses», pourquoi s’en faire? Pour preuve, corrigez-moi si je me trompe, toutes les personnes tuées dans les nouveaux quartiers autour de Luanda n’ont jamais fait l’objet d’une enquête. Jamais. Alors forts de l’impunité, les délinquants ont cru trouver là un intarissable terroir. Engagés comme ils le sont sur cette voie de gain facile, il leur est difficile de s’arrêter.  Alors, aujourd'hui ils se tournent vers les nouveaux riches, une classe composée dans sa majorité des membres du Mpla. C’est bizarre comme le fétiche se retourne parfois contre le féticheur. Tardivement, le pouvoir d'une manière désordonnée essaye de réagir. On ne touche pas à ses oints, lit-on dans la bible. D'abord ils ont mis en marche une campagne pour récupérer les armes à feu. Malheureusement, les résultats obtenus ne furent pas à la hauteur. La place était inondée par les armes vendues par les Cubains, sur le retour. Aujourd'hui encore,  personne ne peut imaginer le nombre d’armes en circulation dans le pays.

Finalement, le Mpla a été un porte malheur pour le peuple angolais. Non contents d'avoir créer dans le pays cette situation d'insécurité par l'absence de contrôle des armes, ils ont en plus poignardé ce même par le vol des deniers publics. Ce qui a accentué la crise dans le pays. Avoir des fins du mois difficiles dans un pays où l'insécurité a élu domicile est une équation très compliquée à résoudre.  

 


 
Sobamasoba, l’analyse politique qui informe.
Eduardo M. Scotty
 

 


 

 

2 commentaires:

  1. Garcia
    Luanda est devenue une ville peu sûre. Quand on dort la nuit, on ne sait pas ce qui vous arrivera. Si ce n'est pas la police qui viendra frapper à votre porte parce que vous avez tenu pendant la journée des propos désagréables contre le régime; ce sont les bandits (anciens membres de la milice du parti)qui viendront vous cambrioler parce que vous avez ce qu'ils n'ont pas. Et dire que le pays dispose d'une police nationale censée veiller à la tranquillité des citoyens.

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  2. JM de Nascimento.
    E triste. Haver isso neste tempo da paz.

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