mercredi 22 juin 2016

L'opposition politique angolaise va-t-elle à la dérive?


GENVAL. Il y a quelque temps, ce nom ne signifiait absolument rien pour beaucoup d’entre nous. C’était juste le nom d’une petite commune dans la banlieue de Bruxelles. Une petite commune qui a eu l’honneur d’accueillir les assises de partis politiques congolais d’opposition. Du 8 au 9 juin 2016, les opposants au régime de Kabila se sont rencontrés pour élaborer une stratégie commune. Les résolutions issues de ce conclave définissent clairement leur position. À Kinshasa, le camp du président Kabila, arrogant et moqueur, exprimait des doutes quant à l’union des opposants. Et pourtant, ils sont arrivés à dégager un consensus autour de l’ordre du jour proposé par les organisateurs de la réunion.

Lorsque j’observe la détermination et le patriotisme avec lesquels ces forces politiques congolaises de l’opposition se démènent pour faire entendre leurs voix et occuper l’espace qui leur revient de droit dans le pays, je suis très admiratif. À travers leurs actions, manifestations et meeting, qu’ils osent organiser dans leur pays, j’ai le sentiment d’avoir en face de moi des hommes et des femmes qui croient dans ce qu’ils font et ont la profonde conviction d’aller dans la bonne direction. Le courage dont ils font preuve, malgré les différences qui existent entre eux, mérite une immense admiration de tous ceux, comme moi, accompagnent le processus de démocratisation en RDC. Même si leur démarche est entachée de quelques imperfections, ce qui est tout à fait normal, il faut reconnaitre qu’à GENVAL, ils ont été capables de mettre de côté leurs ambitions personnelles pour privilégier les intérêts du peuple. Seuls nos frères du Burkina Faso peuvent en dire autant.

En Angola, mon pays, je souhaite que les choses se passent de la même manière que chez nos voisins. Malheureusement, à Luanda, quoique l'on dise, les opposants sont soumis au régime et sont complices des excès que ce même régime commet. Les leaders angolais de l’opposition et leurs partis politiques ne se distinguent pas de ceux qui ont opté pour la dictature dans le pays. De temps en temps, ils nous servent un discours moralisateur pour montrer qu’ils existent, et puis plus rien jusqu’à la prochaine déclaration. L’Angola vit une grave crise avec un chômage qui ne cesse d’augmenter à cause de la fermeture des entreprises et du manque de devises dans le système bancaire pour l’acquisition de matériel et de matière première, que fait l’opposition ? RIEN.

Le pays assiste à une importante fuite des capitaux favorisée par la clique de Dos Santos, sa famille et ses amis. Environ 400 millions de dollars volaient, en temps de vaches grasses,  vers d’autres cieux chaque semaine. Qu’a fait l’opposition ? RIEN.

Nous assistons à la hausse vertigineuse du coût de la vie avec l’augmentation de prix des livres, des uniformes, du droit d’inscriptions pour les étudiants, des principaux produits alimentaires, du combustible pour les véhicules et les générateurs (l’électricité est un bien précieux en Angola), que fait l’opposition ? RIEN.

En 2011, des jeunes de Luanda se sont organisés en mouvement révolutionnaire pour protester contre la politique de Dos Santos et son maintien trop prolongé au pouvoir (à l’époque 32 ans). Ils furent arrêtés en 2015, jugés de la manière dont on connait l'irrationalité et condamnés dans des circonstances que tout le monde connait. Avant leur détention, ils ont tenté, seuls, à plusieurs reprises d’organiser des manifestations qui ont toutes été dispersées. Aucun parti de l’opposition n’a montré le bout de son nez pour les soutenir. Face à cette oppression du régime, aux arrestations arbitraires et aux injustices, que fait l’opposition ? RIEN.

Plus grave. La politique discriminatoire du système bancaire qui condamne les enfants de pauvres à l’analphabétisme. Les prix élevés de droits d’inscriptions dans les universités publiques et privées quand les salaires des parents sont insuffisants bloquent l’émergence des cadres issus des milieux pauvres. Ceux qui ont pu, avec beaucoup de sacrifices, envoyer leurs progénitures aux études à l’étranger sont aujourd’hui complètement asphyxiés. La seule option qui leur reste : faire revenir les enfants au pays. Même quand ils ont eu la chance de bénéficier d’une bourse d’études, aujourd’hui ils ne reçoivent plus rien. À ce sujet, que fait l’opposition ? RIEN.

La police nationale, les agents de contrôle (agentes de fiscalizaçâo), les militaires rançonnent la population, maltraitent les petits commerçants ambulants (as zungueiras), confisquent leurs biens et moyens de subsistance dans un pays où trouver un travail est un chemin de combattant, que fait l’opposition ? RIEN.  

À regarder ce tableau, on dirait qu’en Angola il n’y a pas d’opposants. Il n’y a personne de la dimension de Jonas Malheiro Savimbi, capable d’élever la voix et de dire STOP. Et pourtant, dans la Constitution angolaise, il y a des dispositions qui, légalement, permettent à l’opposition de s’exprimer. Des politiciens comme Marcolino Moco, Samakuva, Sediengani Mbimbi, Ngola Kabangu Eduardo Kuangana, Filomeno Vieira Lopes, Chivukuvuku, Lopo do Nascimento et autres, au lieu de lire les signes du temps, adopter des politiques de contestation parlementaire, dénoncer des  excès du régime, ils s’enferment dans leurs cocons en croyant que seuls, chacun de nous dans son coin, nous pourrons déboulonner le régime et son système de corruption. D’eux, le peuple attend une véritable UNION de l’opposition avec un projet viable ; une plate-forme politique du changement. Il est temps que, comme les Congolais de la RDC, les opposants à la politique du Mpla se mettent autour d’une table pour débattre de l’Angola. Est-ce trop demander ?    

 

Inspiration : William Tonet

Sobamasoba, l’analyse politique qui informe.

Eduardo Scotty Makiese.          

1 commentaire:

  1. David.
    De mieux en mieux. L'équilibre est en train de s'établir. Si nous reprochons ou critiquons le Mpla, c'est parce qu'ils sont au pouvoir et doivent rendre compte au peuple de ce qu'ils font. Le peuple leur a donné un mandat, devant ce peuple ils sont redevables. Mais, l'opposition aussi a des comptes à rendre à ses membres et militants. Chaque fois que necessaire, l'opposition doit nous dire le genre de travail qu'ils font pour rééquilibrer les tendances dans le pays. Ils ne peuvent pas laisser le pouvoir faire ce qu'il veut sans réagir. Si les manifestations sont autorisées par la constitution, l'opposition doit utiliser ce levier pour remettre le pouvoir sur le droit chemin. Merci Kota pour cette analyse. Força.

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