jeudi 26 octobre 2017

Le Président Joâo Lourenço est-il capable de s'affranchir de l'oppressante tutelle du Mpla?


Il y a environ un mois depuis que Joâo Lourenço exerce les fonctions de Chef de l’État en Angola. Porter un jugement sur sa manière de gouverner le pays, pendant les trente premiers jours de son mandat, est, à mon avis, un peu prématuré. Toutefois, compte tenu de ce qui se dit à son sujet, il n’est pas absurde d’analyser les premières mesures prises par lui et son gouvernement depuis leur arrivée au pouvoir. Dans ma dernière publication, parue après la promulgation de ce nouveau gouvernement, j’ai focalisé mon analyse sur un élément qui m’a paru fondamental et qui est intervenu dans la composition de cet exécutif : le népotisme. Beaucoup d’observateurs de la politique angolaise ont, comme moi, retrouvé dans ce premier cabinet Lourenço la griffe de José Eduardo dos Santos. La configuration de l’équipe Lourenço ressemble tellement à celle de son mentor que nous croyions tous à la main mise du parti sur le gouvernement. Finalement Dino Matross, secrétaire général du Mpla, a-t-il raison quand il affirme que Joâo Lourenço est tenu à obéir aux injonctions de son parti ? 

Visiblement, il y a léger vent de rébellion qui souffle à la « Cidade Alta ». En analysant les informations en provenance de Luanda, j’ai la nette impression que le nouveau Président de l’Angola veut s’émanciper de la puissante tutelle du Mpla. Ses pas sont encore hésitants, mais on sent une certaine fermeté dans sa démarche. Dès qu’il a été informé par le Procureur général de la République des poursuites dont Carlos Aires da Fonseca PANZO, son secrétaire aux affaires économiques, faisait l’objet par la justice helvétique (Suisse), il l’a, sans hésiter un seul instant, démis de ses fonctions. En 42 ans, c’est une première pour les Angolais. Seulement, n’allons pas trop vite en besogne. Quel crédit doit-on accorder à cet acte ? Quand l’aumône que l’on donne à un mendiant est trop conséquente, le mendiant se méfie. Poser un acte d’une telle grandeur, dans un pays où l’impunité est une règle, rend l’acte suspect aux yeux des personnes averties. Mais il y a un doute raisonnable. D’autres actes posés par le nouveau président laissent croire à un véritable changement de mentalité dans la conduite de la politique en Angola. Voyons quelques exemples qui sortent de l’ordinaire :

Quand elle a été nommée à  la Présidence de Sonangol, Isabel dos Santos a démis l’ancien Président de la commission exécutive de Sonangol (Recherche et Production SNL),   Carlos Sousa e Oliveira, dans des conditions humiliantes en l’accusant de présenter « des insuffisances en matière de gestion et  de détournements de fonds ».  Pour remettre les choses  dans l’ordre, João Lourenço a nommé récemment ce même Carlos Sousa e Oliveira au poste de Secrétaire d'État des pétroles, une nomination qui le place dans une position hiérarchiquement au-dessus d'Isabel dos Santos et de ses consultants portugais.

Pendant 20 ans, Isabel dos Santos, grâce au pouvoir détenu par son pèreavait à elle toute seule le monopole du secteur des télécommunications. Cette position lui permettait  d’empêcher d’autres entrepreneurs, nationaux ou étrangers, d’investir dans la téléphonie mobile en Angola. Dans sa condition de détentrice du monopole des télécommunications, Isabel dos Santos fixait, à travers sa société UNITEL, les prix les plus élevés sur ce marché.  À la grande surprise des Angolais,   le président de la République, João Lourenço, a déclaré ce lundi 16 octobre qu'il va soumettre à l'Assemblée nationale l'approbation d’une loi sur la concurrence afin de finir avec les monopoles et autres imperfections existants sur le marché angolais.

Dans la poursuite de la modification des statuts de Sonangol, Isabel dos Santos a récemment écarté de la société l'ingénieur Paulino Jeronimo, un administrateur exécutif et un cadre de confiance du général Leopoldino de Nascimento « Dino ».  Pour corriger cet abus, selon des informations qui circulent à Luanda, le président Joâo Lourenço place Paulino Jeronimo comme le meilleur candidat pour la direction de la future agence des pétroles, une agence qui aura la compétence de contrôler la Sonangol.

Depuis qu’elle est devenue la Présidente de Sonangol, Isabel dos Santos est considérée comme un foyer d'instabilité en Angola.  À l'intérieur de MPLA, il y a eu des pressions pour que le Président João Lourenço l’écarte de cette entreprise d’État avant qu’elle ne la fasse couler. Récemment, une dirigeante de OMA, Lourdes Caposso, a lancé sur les réseaux sociaux un appel suggérant le sauvetage de Sonangol. En même temps les fonctionnaires de la société ont élaboré un manifeste pour que le Président de la République annule le décret qui attribue à Isabel dos Santos le pouvoir de nommer les membres du Conseil d’Administration de la société. Peut-on considérer ces tacles comme un début de changement dans la manière de gouverner ? La réduction du nombre des vice-gouverneurs de provinces de 54 à 38, et la proposition de nommer de nouveaux procureurs de la République en lieu et place des anciens, corrompus et incompétents, sonnent comme un avertissement aux oreilles de ceux qui sont habitués à l’oisiveté et à l’impunité.  Peut-on dire que l’Angola est en train de se débarrasser de ses mauvaises habitudes et des méthodes de José Eduardo dos Santos? Seul le temps nous le dira. Mais en attendant, je vous laisse juger.

Sobamasoba, l’analyse politique qui informe.

Eduardo Scotty M.    


  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire